Mitja Tusek
Life on mars
26 avril - 02 juin 2018Mitja Tusek
Life on mars
26 avril - 02 juin 2018
Dans l’exposition Life on Mars, l’artiste slovène Mitja Tušek, dépeint l’ambiguïté « des êtres vivants » à travers des existences picturales qui oscillent entre représentation et abstraction, protocole et aléatoire.
C’est tout d’abord le genre du portrait qui se trouve rappelé avec de grandes toiles tirées de la série des Cercles amorcée en 2015. Voici avec Cercles 2018, de nouveaux portraits de groupe. Chaque figure disloquée est une variation combinatoire de neuf disques noirs de diamètres différents, agencés sur un fond pâle à la fois uni et instable car travaillé avec des pigments prismatiques qui réfléchissent l’ensemble du spectre chromatique en fonction de l’inclinaison lumineuse. Les ponctuations géométriques circulaires sont symboliquement chargées, ce sont les neuf orbes de l’Enfer de Dante mais aussi bien des images-signes plus légères : une déclinaison de grotesques Mickey Mouse. Les taches aveuglantes évoquent aussi la machine abstraite du visage conceptualisée par Deleuze : « mur blanc – trou(s) noir(s) ».
Puis le motif de la femme nue se joue de son sujet académique à travers des formes qui s’épanchent et s’émancipent de leur dessein pour tendre vers le chaos de l’informe. « Se rappeler qu’un tableau, écrit Maurice Denis à la fin du 19° siècle, avant d’être […] une femme nue […] est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées». Précisément chaque toile peinte à l’acrylique est un assemblage résultant d’une concrétion d’applications successives de dépôt de matière picturale. Selon un même processus d’élaboration, chaque couche de peinture laquée déposée finement sur une première toile est en effet immédiatement appliquée encore fraiche par report sur une seconde toile pour la production d’une réplique, une empreinte tirée de cette matrice éphémère. Chaque toile est ainsi feuilletée d’un assemblage d’une soixantaine de reports estampés. Ces pellicules picturales engendrent des figures féminines déformées dans la matérialité de leur chair de peinture, elles s’abîment en symétrie inversée dans l’étrangeté d’une ressemblance non iconique, une « ressemblance par contact ». Réversibilité et dissemblance sont constitutives de l’empreinte. Avec les Femmes nues, 2004-2011, matrice et tirage se confondent. Laquelle est le revers de l’autre ? Ces doublures de peinture produisent du doute.
Les Peintures texte, 2009-2018, exacerbent cette réversibilité symétrique en rejouant le processus des fameux tests de Rorschach. Mais au-delà de la visibilité de ces surfaces de projection pour l’imaginaire et la perception de leur matérialité sensible, s’ordonnance conjointement la lisibilité de mots à la verticale, dissimulés par le signifiant pictural. Comme un chiasme, à la fois visuel et textuel, se répondent les deux faces d’une même médaille : « Fierté/Honte ». Ou encore « Que faire ? ». Cet emprunt citationnel à Lénine puis à Mario Merz (dans son œuvre Che Fare, 1969) qui traduit un doute à la fois existentiel et politique, réfléchit aussi l’instabilité du regardeur, son hésitation entre ce qu’il voudrait voir et ce qu’il pourrait concevoir.
Tout visible n’est-il pas étoffé de sa doublure d’invisible ? « Il suffit de regarder autour de soi pour voir la vie sur Mars », affirme sérieusement, avec humour, Mitja Tušek.
C’est tout d’abord le genre du portrait qui se trouve rappelé avec de grandes toiles tirées de la série des Cercles amorcée en 2015. Voici avec Cercles 2018, de nouveaux portraits de groupe. Chaque figure disloquée est une variation combinatoire de neuf disques noirs de diamètres différents, agencés sur un fond pâle à la fois uni et instable car travaillé avec des pigments prismatiques qui réfléchissent l’ensemble du spectre chromatique en fonction de l’inclinaison lumineuse. Les ponctuations géométriques circulaires sont symboliquement chargées, ce sont les neuf orbes de l’Enfer de Dante mais aussi bien des images-signes plus légères : une déclinaison de grotesques Mickey Mouse. Les taches aveuglantes évoquent aussi la machine abstraite du visage conceptualisée par Deleuze : « mur blanc – trou(s) noir(s) ».
Puis le motif de la femme nue se joue de son sujet académique à travers des formes qui s’épanchent et s’émancipent de leur dessein pour tendre vers le chaos de l’informe. « Se rappeler qu’un tableau, écrit Maurice Denis à la fin du 19° siècle, avant d’être […] une femme nue […] est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées». Précisément chaque toile peinte à l’acrylique est un assemblage résultant d’une concrétion d’applications successives de dépôt de matière picturale. Selon un même processus d’élaboration, chaque couche de peinture laquée déposée finement sur une première toile est en effet immédiatement appliquée encore fraiche par report sur une seconde toile pour la production d’une réplique, une empreinte tirée de cette matrice éphémère. Chaque toile est ainsi feuilletée d’un assemblage d’une soixantaine de reports estampés. Ces pellicules picturales engendrent des figures féminines déformées dans la matérialité de leur chair de peinture, elles s’abîment en symétrie inversée dans l’étrangeté d’une ressemblance non iconique, une « ressemblance par contact ». Réversibilité et dissemblance sont constitutives de l’empreinte. Avec les Femmes nues, 2004-2011, matrice et tirage se confondent. Laquelle est le revers de l’autre ? Ces doublures de peinture produisent du doute.
Les Peintures texte, 2009-2018, exacerbent cette réversibilité symétrique en rejouant le processus des fameux tests de Rorschach. Mais au-delà de la visibilité de ces surfaces de projection pour l’imaginaire et la perception de leur matérialité sensible, s’ordonnance conjointement la lisibilité de mots à la verticale, dissimulés par le signifiant pictural. Comme un chiasme, à la fois visuel et textuel, se répondent les deux faces d’une même médaille : « Fierté/Honte ». Ou encore « Que faire ? ». Cet emprunt citationnel à Lénine puis à Mario Merz (dans son œuvre Che Fare, 1969) qui traduit un doute à la fois existentiel et politique, réfléchit aussi l’instabilité du regardeur, son hésitation entre ce qu’il voudrait voir et ce qu’il pourrait concevoir.
Tout visible n’est-il pas étoffé de sa doublure d’invisible ? « Il suffit de regarder autour de soi pour voir la vie sur Mars », affirme sérieusement, avec humour, Mitja Tušek.
Anne Favier, 2018.
1 - Georges Didi-Huberman, « la ressemblance par contact, c’est souvent ne pas se laisser reconnaitre », in La ressemblance par contact, 2008, Paris, les Editions de Minuit.
2 - Maurice Merleau-Ponty, Le propre du visible est d’avoir une doublure d’invisible, in L’œil et l’esprit, Paris, Gallimard, 1964, p. 85.
1 - Georges Didi-Huberman, « la ressemblance par contact, c’est souvent ne pas se laisser reconnaitre », in La ressemblance par contact, 2008, Paris, les Editions de Minuit.
2 - Maurice Merleau-Ponty, Le propre du visible est d’avoir une doublure d’invisible, in L’œil et l’esprit, Paris, Gallimard, 1964, p. 85.
Artiste de l'exposition : Mitja Tušek
Informations Pratiques
Ceysson & Bénétière
8 rue des Creuses
42000 Saint-Étienne
Mercredi – Samedi
14h – 18h
T: + 33 4 77 33 28 93